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La Nostalvie

« − La “nostalvie”… Tu veux dire la nostalgie, Patrick ?

− Non, la “nostalvie”, c’est différent.

− Quelle différence ?

− La nostalgie chronique est une aigreur, elle est grise. C’est du soleil derrière et du brouillard devant. La “nostalvie” est rose, c’est du soleil toujours. C’est se rappeler qu’un coup d’œil dans le rétro est le moyen le plus sûr de déboîter sans risques. Il ne s’agit pas de refuser le progrès et la marche inexorable du temps, mais juste de picorer des bouts d’avant pour mieux nourrir l’après ! »

Dans La Nostalvie, Patrick Sébastien revient, avec verve et sensibilité, sur les cent vies passionnantes qu’il a vécues. Il nous invite aussi à faire un pas en arrière pour mieux aller de l’avant. « Nous devons prendre, écrit-il, le temps de puiser dans “hier” les valeurs qui nous fabriqueront des “demain” qui chantent. » 

Interview de l’auteur

Pourquoi avoir appelé votre livre « La NostalVie » ?

La « NostalVie », c’est un néologisme par rapport à la nostalgie qui ne dit pas que « tout était mieux avant », mais que pour améliorer notre présent et notre futur, il faut faire revivre des valeurs d’hier. La solidarité, l’acte gratuit, le besoin d’autorité, la primauté de l’humain, toutes ces valeurs ont été progressivement abandonnées alors que ce sont elles qui, précisément, nous permettraient d’avancer et de rester en vie. Donc pas de nostalgie passéiste, mais une « NostalVie » positive et constructive.

Vous avez choisi comme photo de couverture une image où vous souriez à un enfant. Est-ce que c’est une manière pour vous d’exprimer l’importance de la transmission ?

C’est une manière de dire à la jeune génération qu’il ne faut pas désespérer, que le monde peut être beau à condition qu’on remette de l’humain
dans nos vies. On est aujourd’hui le pays qui consomme le plus de tranquillisants. Le sentiment d’angoisse, d’insécurité, de peur est partout. Moi je voudrais que ce môme grandisse dans un monde où la confiance et la bienveillance retrouvent toute leur place.

Dans votre livre, il y a un personnage imaginaire, surnommé Flick, avec qui vous dialoguez. Que représente-t-il ?

Il représente tout ce qui nous empêche de nous exprimer et de vivre librement. Il incarne les interdits, la pensée unique, les intégrismes, tous
ces mots en « isme » qui pèsent sur nous comme une chape de plomb. Chaque fois que Flick intervient, c’est pour faire le pendant à ce que j’écris, pour me contredire, et ça m’oblige à aller plus loin, à argumenter, à me révolter parfois, mais aussi à en rire, un bon moyen de combattre. D’ailleurs, mon livre est joyeux, pas donneur de leçons. Au détour d’une page, je le dis : plutôt que s’inquiéter de l’intelligence artificielle, on ferait mieux de passer du temps à lutter contre la connerie naturelle. Pas faux, non ?

Vous évoquez à plusieurs reprises l’évolution des rapports entre les hommes et les femmes. Qu’est-ce qui a changé selon vous ?

J’ai eu la chance d’être élevé et entouré par des femmes. Ma grand-mère avait cinq filles et ma mère a été pour moi la personne la plus importante au monde. Elle a souffert. Elle a même subi une tentative de féminicide. Je sais ce que les femmes ont enduré et endurent encore. Mais je ne crois pas qu’on améliorera les choses en organisant la guerre entre les hommes et les femmes. Les intégrismes féministes jouent contre leur camp. Et détériorent les relations au lieu de les apaiser. On arrive à des situations ubuesques. Mon avocat, par exemple, m’a sérieusement conseillé de mettre mon téléphone en marche quand je me fais livrer le petit déjeuner dans ma chambre d’hôtel. Histoire de bien montrer que je n’ai commis aucun acte répréhensible. Toutes les femmes ne sont pas des anges, tous les hommes ne sont pas des démons. Ce combat, il ne faut pas le mener contre les hommes mais avec les hommes, contre les plus barbares d’entre eux. Voilà ce que je pense.

Vous êtes très critique aussi envers les réseaux sociaux…

Les réseaux sociaux, c’est un poison. Sur les réseaux, je suis mort tous les jours. J’ai appris aussi cet été que ma société avait fait faillite. Ah bon, pas au courant ! C’est complètement faux. Il y a aussi ce déferlement de haine et d’agressivité qui est terrifiant. En une phrase, tu peux te faire détester de la France entière. Et, plus grave, des mômes harcelés, moqués, se suicident. Tout n’est pas à jeter dans les réseaux sociaux, moi-même je les utilise pour parler de mes projets, mais on ne peut pas rester passifs face à cette déshumanisation. C’est comme les incivilités, le manque de respect. Comment peut-on accepter qu’on caillasse des pompiers et des médecins ? À la limite qu’on se bagarre avec des flics, ça fait partie du jeu, mais des pompiers et des médecins qui viennent nous aider ! On ne peut pas se contenter de mises en garde et de réactions indignées, il faut être intraitable sur ces sujets. C’est comme ça qu’on retrouvera des vrais espaces de liberté. C’est quand même plus important que tous les clashs à la con, du genre « Juliette Armanet n’aime pas les chansons de Michel Sardou »…

Diriez-vous que ce livre est le bilan ou les leçons d’une vie ?

C’est un partage, ce livre. Et un message : il faut vivre et ne pas se contenter d’exister. Ne pas se laisser impressionner par les torrents d’informations anxiogènes, les discours négatifs, les faux débats. Moi, je dis aux gens : « Faites-vous plaisir, dans le respect des autres, et ne vous laissez pas gagner par la peur. » Je connais très bien la France profonde, plus que jamais j’ai envie de la raconter. Je veux être l’interprète de tous ces gens dont on ne parle pas et qui, malgré les difficultés, n’aspirent qu’à bien vivre. J’aimerais qu’il y ait plus d’artistes pour porter cette parole humaniste. L’espace médiatique est saturé par des politiques déconnectés de la réalité et par des fouteurs de m… professionnels qui cherchent à faire du buzz par l’insulte et l’invective. À quand le retour des poètes et des vrais saltimbanques ? Ce bouquin, il représente une autre France, qui est là, qui existe, qui est même très majoritaire, et qui a envie d’apaisement. On parle toujours du « vivre ensemble », très bien, je suis pour. Mais alors remettez dans l’ensemble tous ces gens-là !

Malgré toutes les épreuves que vous avez traversées, vous êtes toujours aussi actif. C’est important pour vous de maintenir ce lien avec le public ?

C’est aussi une manière de rester en vie. J’ai fait cet été des concerts où il y avait 30 000 personnes, des vieux, des nostalgiques, des petits, des gros, des riches, des pauvres, mais aussi des gamins qui semblent se reconnaître dans mes propos de vieux con (il sourit). C’est quand même un signe que les jeunes fassent leurs fêtes sur des tubes des années quatre-vingt ! Quand tu leur parles de ces années-là, ils ont les yeux qui brillent. Ils disent : « Mais putain, c’était bien, Patrick ! » Et je leur réponds : « Mais oui, c’était bien… parce qu’il y avait plus de liberté, de spontanéité et, d’une certaine manière, d’insouciance. » Mon livre, c’est une manière de les encourager à retrouver ce goût de la liberté. Ce goût de la vraie vie.

Un mot sur vos projets futurs ?

Parallèlement à la sortie du livre, je démarre le 3 novembre un spectacle très intime qui s’appelle « Hommage et dessert ». J’ai écrit une douzaine de chansons avec des imitations – je reviens à mes premières amours – d’artistes que j’ai connus et tellement aimés : Coluche, Gainsbourg, Brassens, Nougaro, Gabin, et bien d’autres. Un petit air de « NostalVie », quoi…

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